Même l'homme le plus imaginatif n'aurait jamais imaginé que la harpe puisse déployer toute sa gracieuse beauté au centre de la scène, en soliste. Xavier De Maistre est l'un des rares à avoir accompli ce miracle et à avoir fait exploser le Théâtre Hoan Kiem, lors de la représentation avec l'Orchestre Symphonique du Soleil intitulée « La Légende de la Harpe ».
L'homme qui a changé la façon dont le monde apprécie la harpe
Né en 1973 à Toulon (France), Xavier n'a pas bénéficié du soutien familial pour s'adonner à sa passion pour la harpe, car ce n'était pas un véritable métier. C'est grâce à sa mère, soucieuse d'une éducation équilibrée, que le garçon a pu se familiariser avec l'instrument à l'âge de 9 ans. Il a eu la chance de devenir l'élève de nombreux musiciens célèbres tels que Vassilia Briano, Catherine Michel et Jacqueline Borot, et a remporté avec brio son premier prix international à 16 ans.
Cependant, pour réaliser le rêve de ses parents de faire carrière, Xavier dut tout de même étudier les sciences politiques et l'économie, mais ses professeurs lui conseillèrent de « ne perds pas de temps, concentre-toi sur ton instrument préféré ». Ce n'est qu'après avoir été maintes fois récompensé lors de prix internationaux de musique à Cardiff, Munich, Vienne et Jérusalem… et avoir obtenu le poste de harpiste solo à l'Orchestre symphonique de la Bayerischer Rundfunk que le jeune homme parvint à convaincre sa famille.

Jouer de la harpe à 47 cordes et 7 pédales n'est certes pas chose aisée. « Une bonne mémoire, de la finesse et un sens aigu du rythme sont essentiels. Jouer de la harpe entièrement par cœur est un grand défi artistique, c'est pourquoi je considère cet instrument comme hautement intellectuel », confiait un jour la légende de la harpe.
Ancien harpiste solo du plus prestigieux Orchestre philharmonique de Vienne, où chaque solo était un défi exigeant, Xavier de Maistre s'est bâti une carrière internationale en impressionnant les musiciens les plus expérimentés. Xavier de Maistre ne se contente pas de jouer : il parle à la harpe, la met au défi et la guide, obligeant le public à repenser tout ce qu'il pensait savoir sur cet instrument complexe, avec ses cordes et ses pédales.
Choisissant courageusement de devenir un artiste solo, se produisant dans des théâtres célèbres tels que le Carnegie Hall (New York), le Musikverein (Vienne), le Concertgebouw (Amsterdam), l'Opéra de Sydney (Sydney), il a été classé par les critiques musicaux de Gramophone, Le Figaro et BBC Music Magazine comme l'un des rares « artistes qui ont changé la façon dont le monde apprécie la harpe ».
Xavier de Maistre était autrefois qualifié de musicien virtuose, « capable d'exprimer une grande diversité d'expressions ». Mais lorsqu'il a eu l'idée d'une performance solo, il s'est retrouvé face à un défi de taille, car peu d'œuvres étaient écrites spécifiquement pour cet instrument. Convaincu que la harpe pouvait devenir populaire, mais qu'il était très difficile de convaincre le grand public qu'il s'agissait d'un instrument soliste sérieux, il a dû explorer de nombreuses pistes, de la commande de nouvelles œuvres à la création de transcriptions du vaste répertoire de la musique instrumentale humaine. « En tant que harpiste, nous n'avons pas 23 concertos de Mozart à interpréter comme un pianiste. Je dois donc toujours innover, toujours avoir des idées créatives. »

Xavier a d'abord transcrit des œuvres de Debussy, Mozart et Haydn, mais il était très exigeant sur ce point. « Soixante pour cent du répertoire pour piano peut être joué à la harpe, mais tout n'est pas bon. Il m'est arrivé à maintes reprises de commencer un projet, de me rendre compte au bout de quelques mois qu'il n'était pas bon et d'abandonner, à grand regret. »
Xavier savourait son rôle de pionnier, fasciné par la création d'œuvres inédites et par l'ouverture de portes inconnues à d'autres artistes. Après s'être imposé comme soliste, il commença à commander des œuvres à des compositeurs modernes, une responsabilité qu'il estimait devoir assumer.
Sublimez-vous avec le son de la harpe
Il n'est donc pas surprenant que la Légende de la Harpe ait été si chaleureusement accueillie par les mélomanes de la capitale. Le public a rempli l'auditorium de 900 places, pas une seule ne restait vide. Le public attendait avec impatience l'apparition de ce talentueux artiste. Et il a suscité des émotions sublimes avec le Concerto pour harpe en mi bémol majeur de Reinhold Glière – une œuvre rare du XXe siècle qui exploitait pleinement le potentiel sonore de la harpe.
La harpe est encore parfois perçue comme un instrument doux et éthéré, n'apparaissant avec éclat qu'en arrière-plan de scènes de cinéma oniriques ou romantiques. Mais avec ce concert, ce stéréotype est balayé de manière convaincante. Le Concerto affirme que la harpe n'est pas seulement un ornement de l'orchestre, mais peut en devenir le protagoniste. Écrite en 1938 avec la collaboration de la harpiste russe Ksenia Erdely, cette œuvre élégante mais néanmoins remarquable, alliant mélodies lyriques et moments exigeant une véritable technique sur un instrument réputé difficile à dompter, a laissé une belle impression sur l'auditeur.
Le premier mouvement du Concerto de Glière s'ouvre sur un style romantique magnifique et un thème ouvert, avec de longues phrases musicales douces mais non moins profondes à la harpe. Le deuxième mouvement, telle une berceuse russe, flotte sur les cercles harmoniques de l'orchestre. Mais tout explose véritablement dans le dernier mouvement, avec une danse entraînante, teintée de sonorités folkloriques, de rythmes malicieux et scintillant de couleurs éclatantes. Les trois mouvements forment trois scènes : solennelle, spacieuse, lyrique, puis une explosion de techniques d'interprétation dans le dernier mouvement. Pour Xavier de Maistre, il ne s'agit pas seulement d'une démonstration technique, mais d'un dialogue délicat entre la harpe et l'orchestre – où chaque son est à la fois clair, vif et chaleureux, aussi beau qu'un poème lyrique.

Il est facile de comprendre pourquoi ce concerto pour harpe est l'un des rares du répertoire classique. Il célèbre le soliste, captive le public et considère l'orchestre comme un partenaire à part entière de l'histoire. Sous les doigts de Xavier de Maistre, la harpe, longtemps associée à une imagerie mythique, devient quelque chose de très réel, de très humain et de très vivant – à l'image de l'homme lui-même.
Et fonctionne avec une forte empreinte slave
En plus de la prestation très attendue de l'invité spécial, le chef d'orchestre Olivier Ochanine et les talentueux musiciens du Sun Symphony Orchestra ont également présenté aux mélomanes deux œuvres de deux compositeurs d'Europe de l'Est.
Du premier vers brumeux au final entraînant de Galánta Dances (composé par Zoltán Kodály en 1933), l'œuvre est remplie de couleurs anciennes et gracieuses et de l'empreinte indubitable de la Hongrie - un lieu qui a laissé une profonde impression dans son esprit avec les musiciens gitans jouant dans les tavernes et sur les places.
Dans Galánta Dances , Kodály tisse le folklore en une tapisserie éblouissante. La pièce débute tranquillement, avec un solo de clarinette qui surgit spontanément du silence, puis laisse place à une série de danses de plus en plus passionnées et joyeuses. Les rythmes, rythmés, planent et rebondissent comme ceux de danseurs expérimentés, tantôt enjoués, tantôt explosifs, sont incroyablement envoûtants.

Si les Danses de Galánta sont un toast musical passionné, la profonde Symphonie n° 7 en ré mineur, op. 70, B141, d'Antonín Dvořák est une œuvre de foi, de réflexion et d'une immense émotion. Une œuvre non seulement divertissante, mais aussi touchante. Composée en 1885 pour la London Philharmonic Society, elle est considérée comme le chef-d'œuvre de Dvořák. Sombre, solennelle et méditative, elle dresse le portrait d'un compositeur confronté à la perte, en quête d'identité et s'appuyant sur le pouvoir de la musique pour surmonter tout cela.
Le premier mouvement ne s'ouvre pas tranquillement, mais explose, chargé de conflits intérieurs. Le thème et la forme musicale se combinent et se développent avec une logique rigoureuse, tout en conservant une charge émotionnelle. Le deuxième mouvement possède un souffle réconfortant – comme une prière ou un chant folklorique résonnant de l'autre côté de la colline, doux mais sans sentimentalité, même si c'est le calme dans la tempête. Le Scherzo qui suit nous rappelle que même dans les épreuves, l'âme humaine peut s'harmoniser joyeusement avec le rythme tchèque caractéristique, puissant, irrégulier et très frénétique. La musique du dernier mouvement gagne en force, tendant vers quelque chose de plus grand qu'elle-même, se concluant non pas par la gloire de la victoire, mais par l'affirmation de soi après de nombreuses épreuves.

Avec une structure en trois œuvres oscillant entre enthousiasme coloré, lyrisme délicat et explosions de fierté, La Légende de la Harpe : Xavier de Maistre avec le SSO offre au public l'occasion d'observer comment un virtuose transforme l'instrument apparemment silencieux de l'orchestre en une pièce maîtresse magistrale. L'œuvre est accompagnée d'un voyage musical de la Hongrie à la République tchèque, en passant par la Russie – où chaque pays laissera une profonde empreinte dans l'esprit de l'auditeur.
Source : https://nhandan.vn/loi-thi-tham-cua-chiec-hac-cam-post902093.html
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